Les bains traditionnels de la médina de Rabat
Les bains traditionnels de la médina de Rabat
Les bains traditionnels de Rabat, à l’instar des hammams marocains dans leur ensemble, se structurent autour de deux ensembles fonctionnels distincts mais complémentaires. Le premier correspond au vestiaire et à l’espace de repos (guelsa), dont la fonction est analogue à celle de l’apodytérium des thermes romains, destiné au déshabillage et au rangement des effets personnels. Le second constitue le parcours thermal proprement dit, organisé selon une progression spatiale et thermique à travers une série de salles chauffées.
L’agencement architectural repose sur une séquence de trois salles principales, disposées en enfilade parallèle et formant le noyau fonctionnel du hammam. Depuis le vestiaire, l’usager accède, directement ou par l’intermédiaire d’un vestibule coudé, à la première salle, dite al-Bared (salle froide). Celle-ci se caractérise par une température modérée, assurant une transition progressive pour le baigneur. Cette pièce abrite généralement les cellules d’ablution (mida’a), répondant ainsi aux exigences des pratiques rituelles islamiques.
La deuxième salle, désignée comme intermédiaire (al-wasṭi), constitue l’espace central du hammam, tant par sa fréquentation que par son rôle dans le déroulement du bain. Elle précède la troisième salle, es-Skhoune (l’étuve), dont la température élevée favorise la sudation. Cette dernière est fréquemment pourvue de logettes annexes, offrant aux usagers la possibilité de s’isoler pour effectuer des soins corporels, tels que le savonnage et le gommage.
L’éclairage naturel de ces espaces est assuré par des ouvertures circulaires (Lemḍawi), percées dans les voûtes et fermées par des vitres. Ce dispositif, dont on retrouve des équivalents dans les thermes antiques, témoigne d’une continuité technique tout en s’adaptant aux spécificités locales.
Les données archéologiques confirment que ce modèle tripartite — salle froide, salle tiède, salle chaude — constitue la norme architecturale dominante dans les bains marocains. Cette configuration évoque directement l’organisation des thermes romains, articulés autour du tepidarium, du caldarium et du sudatorium. Toutefois, une divergence majeure réside dans l’absence du frigidarium, espace dédié au bain froid dans la tradition romaine. Son omission dans les hammams marocains s’explique par une adaptation aux exigences des pratiques ablutives islamiques, privilégiant une gradation thermique orientée vers la purification plutôt que vers la confrontation brutale entre chaud et froid.
Au nombre des bains traditionnels les plus connus de de Rabat on trouve :
Hammam Souk
Le Hammam Souk à Rabat est un bain public traditionnel (hammam) situé dans la rue des consules (souk tahti), et il est considéré comme le plus ancien de la médina puisqu’il Il remonterait au XIIe siècle et a été plusieurs fois restauré.
L’édifice du hammam al-Souq s’étend sur une superficie de 548 m² au sol. Son accès principal se fait par une porte sobre, surmontée d’un arc brisé outrepassé, qui ouvre sur un vestibule coudé. Ce dernier mène à une petite pièce rectangulaire de 2,50 m de long sur 1,40 m de large, destinée au percepteur, et communiquant directement avec la guelsa. De plan rectangulaire, la guelsa s’ouvre au sud sur un satwan et à l’est sur une salle utilisée comme dépôt. Le satwan se compose de deux parties distinctes : la première, de forme carrée, est couverte d’une coupole octogonale et flanquée de deux petites annexes latérales ; la seconde, également carrée, s’étend vers l’est et donne accès aux latrines situées au sud-est.
L’organisation des espaces de repos autour de la guelsa dans le hammam al-Souq se distingue nettement de celle des autres établissements de Rabat, qui adoptent généralement un agencement centré autour d’un espace carré appelé al-halqa, servant d’axe structurant pour l’ensemble des annexes. En revanche, le hammam al-Souq privilégie une configuration plus linéaire et fonctionnelle.
La salle froide (al-bard), de plan rectangulaire (6,30 m sur 2,60 m), est prolongée au nord-est par un réduit nommé bit al-‘arays, utilisé comme salle d’ablution. L’éclairage naturel de cet ensemble est assuré par quatorze dawwaya percés dans la voûte en berceau qui le recouvre, conférant à l’espace une atmosphère tamisée et propice à la détente.
Hammam el-Jdid
Situé à la confluence des rues El-Hammam, Hammam el-Alou et Doura, le hammam el-Jdid constitue un précieux témoignage de l’architecture mérinide d’utilité publique à Rabat. Édifié au XIVᵉ siècle par le sultan Abou Inan, fils d’Abou’l-Hassan, il est mentionné dans la table des habous du tombeau de ce dernier, aujourd’hui conservée dans le sahn de la Jamaâ el Kebir. Cette source confirme l’attribution du hammam à la dynastie mérinide et son implantation dans l’ancien Ribat el-Fath.
D’une superficie de 20,85 m sur 9,75 m, le bâtiment présente une organisation spatiale typique des bains islamiques médiévaux. L’accès se fait par deux portes adjacentes menant à une salle de repos carrée, encadrée par quatre colonnes monolithes en pierre, peintes mais non galbées. Cette salle est surmontée d’une coupole octogonale reposant sur des trompes en demi-voûtes d’arête, percée d’ouvertures assurant un éclairage naturel. Deux galeries étroites, légèrement surélevées, bordent la salle à l’ouest et au nord.
À l’ouest, une pièce barlongue semble avoir servi de vestiaire. La salle froide, accessible par une baie axiale depuis la salle de repos, a été partiellement réduite pour accueillir des latrines et un débarras. Elle communique avec la salle tiède, de dimensions 8,66 m sur 3,80 m, couverte d’une coupole centrale flanquée de voûtes en berceau.
La salle chaude, voûtée en berceau, est divisée en trois travées par deux arcs en plein cintre reposant sur des pilastres adossés aux murs latéraux. Un bassin d’eau chaude est encastré dans le mur sud, auquel est adossé un petit local presque carré, destiné aux bains particuliers. Le sol de l’ensemble est pavé de carreaux de marbre blanc, et la chambre de chauffe est située à l’extrémité sud du bâtiment.
Le plan du hammam el-Jdid présente de nombreuses similitudes avec celui du bain de Chellah, légèrement plus vaste et contemporain. Les deux édifices partagent une organisation fonctionnelle cohérente : une entrée par couloir menant à la salle de repos, quatre salles principales reliées par des baies axiales, et une disposition longitudinale des salles de bain. La salle chaude comprend également un espace réservé aux soins privés, soulignant la sophistication des pratiques hygiéniques de l’époque.
Hammam Chorfa
Le Hammam Chorfa, situé dans la rue éponyme, est l’une des branches de la grande rue d’el Gza à Rabat. Propriété des descendants de la zaouia al-Wazzaniya, il occupe une superficie de 282 m² (25 m de long sur 11,40 m de large). L’entrée principale, marquée par un arc brisé outrepassé encadré de colonnettes, donne sur un vestibule à double coudes, voûté en berceau et éclairé par cinq oculi.
L’espace central accessible via une baie en arc plein cintre depuis la guelsa, est une pièce carrée de 2,65 m de côté, surmontée d’une coupole à douze pans décorés de motifs rayonnants. Il est flanqué au nord et au sud de deux salles de repos, dont celle du sud est la plus vaste (13,10 m²). Les latrines sont situées au nord-est.
Le parcours thermal se compose de trois salles successives :
el-bard (salle froide) : petite pièce voûtée en berceau (8,10 m × 2,15 m), anciennement pavée de marbre, avec murs en tadallakt.
el-wastani (salle tiède) : espace réduit (9,46 m × 2,60 m), éclairé par six oculi.
el-skhoun (salle chaude) : chambre rectangulaire (9,24 m × 3,36 m) abritant une Borma (auge d’eau chaude) alimentée par des tuyaux en poterie. Elle est voûtée en berceau et percée de dix oculi en verre (dawwayat).
L’ensemble du hammam est caractérisé par l’usage du tadallakt blanchi à la chaux, sans zellig. Enfin, el-fernatchi, le foyer, possède une entrée indépendante depuis zanqat hammam al-Chorfa, accessible par un escalier en contrebas de 2,40 m. Cette zone comprend également le magasin de combustible (bit al-harq) et la chambre du puits.
Hammam Qasri
Édifié en 1873, ce hammam, relevant des habous, s’étend sur près de 600 m². Sa façade nord, longue de 29 m, s’ouvre par une porte monumentale, encadrée de colonnettes et surmontée d’un arc brisé décoré de stalactites et de moulurations, qui annonce le caractère prestigieux du lieu.
L’entrée en triple coude conduit à la salle de repos (al-geulsa), vaste espace carré (3,90 m de côté), couvert d’une coupole à seize pans curvilignes ornés de motifs décoratifs et percés de petites ouvertures laissant filtrer la lumière. Autour de ce noyau central s’organisent plusieurs salles annexes destinées au déshabillage et à la détente.
Le parcours thermal suit ensuite la séquence traditionnelle des hammams marocains : la salle froide (al-bārd), voûtée et autrefois pavée de marbre ; la salle tiède (al-wasṭānī), la plus spacieuse, coiffée d’une coupole octogonale percée d’oculi ; et enfin la salle chaude (as-skhūn), dotée de son auge d’eau (borma) reliée au foyer.
À l’arrière, le farnatchi abrite le système de chauffe et le dépôt de combustible. Par son plan et ses décors, ce bain illustre avec force la permanence du modèle architectural des hammams marocains au XIXᵉ siècle
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