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Les outils de protection

Les outils de protection et de prise de décision

Les outils de protection et de prise de décision dans la gestion du patrimoine culturel sont essentiels pour assurer la conservation et la valorisation des biens culturels tout en équilibrant les enjeux de développement et les exigences de préservation. Parmi ces outils on note les  Études d’Impact sur le Patrimoine Culturel (EIP) et  les plans de gestion, et d’autres approches méthodologiques qui favorisent une gestion intégrée et durable du patrimoine.

I – Études d’Impact sur le Patrimoine Culturel (EIP)

Les Études d’Impact sur le Patrimoine Culturel (EIP) jouent un rôle fondamental dans les procédures d’évaluation lorsqu’un projet de développement présente des risques d’affecter des sites ou des édifices à valeur historique. Elles sont essentielles pour s’assurer que tout projet respecte et protège l’intégrité du patrimoine tout en permettant son développement harmonieux dans le respect des principes de conservation.

1. Objectif des EIP

Les EIP sont mises en œuvre afin d’évaluer les effets potentiels d’un projet sur un site, un bien ou un objet culturel, en prenant en compte l’impact sur son authenticité, son intégrité et sa valeur historique. Elles permettent de définir des mesures de prévention, de mitigation et, le cas échéant, de compensation pour limiter les effets négatifs.

2. L’Importance des Orientations ICOMOS (2011)

La réalisation des EIP devrait impérativement respecter les Orientations relatives aux études d’impact sur le patrimoine pour les biens du patrimoine mondial culturel émises par ICOMOS en 2011. Ces orientations offrent un cadre rigoureux pour guider l’évaluation des impacts d’un projet sur des sites du patrimoine mondial inscrit, en particulier ceux de valeur culturelle.

Ces orientations insistent sur plusieurs aspects cruciaux lors de la mise en œuvre des EIP :

a. Identification précise du patrimoine affecté

  • L’étude doit d’abord identifier et comprendre le patrimoine concerné en termes de valeurs, d’intégrité, et d’authenticité. Cela comprend à la fois les éléments matériels (bâtiments, structures, objets) et immatériels (traditions, rituels, pratiques) associés au site ou à l’édifice.
  • Cette étape consiste également à cerner le périmètre de protection et les zones tampons autour du bien patrimonial, si elles existent.

b. Évaluation des impacts directs et indirects

  • L’EIP doit évaluer les impacts directs (modifications physiques, risques de dégradation ou de destruction d’éléments patrimoniaux) et indirects (perturbations visuelles, perturbations des écosystèmes, modifications de la fréquentation touristique, etc.).
  • Une attention particulière est donnée à l’impact sur l’environnement immédiat du site et à sa capacité à maintenir ses valeurs culturelles et historiques.

c. Prise en compte des aspects sociaux et culturels

L’étude doit également analyser les impacts sociaux du projet sur les communautés locales. Cela inclut la prise en compte des aspects immatériels du patrimoine, comme les pratiques culturelles vivantes, et l’impact sur l’identité des communautés liées au site.

d. Mesures de compensation

Si des impacts négatifs sont identifiés, des mesures de compensation doivent être proposées pour éviter ou réduire les effets indésirables. Cela peut inclure des modifications du projet initial, des techniques de construction moins intrusives, ou encore des stratégies de restauration ou de protection du site.

e. Consultation des parties prenantes

L’ICOMOS préconise une consultation active avec les communautés locales, les autorités compétentes, les experts en patrimoine, et d’autres parties prenantes. Cela permet de garantir que toutes les perspectives sont prises en compte et que l’étude tient compte de l’impact social et culturel des projets.

Cas de la ville de Rabat

Bien que la législation prenne en compte les études d’impact environnemental, elle n’intègre pas le patrimoine culturel dans ses dispositifs. Pour combler ce vide juridique, la Wilaya de la région de Rabat-Salé Kenitra a adopté en 2019 un arrêté gubernatorial instaurant les EIP. Ces études sont devenues obligatoires pour les grands projets situés dans le périmètre du bien inscrit et de sa zone tampon, afin d’évaluer leur impact sur la VUE du bien. Elles constituent désormais un outil précieux pour la prise de décision

II. Plan de gestion du patrimoine

Le plan de gestion est un outil stratégique conçu pour assurer la conservation durable d’un bien inscrit sur la Liste du Patrimoine Mondial. Il vise à préserver l’intégrité du site tout en intégrant les aspects socio-économiques, culturels et environnementaux. Ce plan repose sur une vision à long terme qui articule les actions nécessaires pour garantir la protection, la gestion et la valorisation du bien.

Le plan se structure en trois parties. La première décrit le bien inscrit, en identifiant les critères d’inscription et la valeur universelle exceptionnelle qui justifie sa protection. Elle précise également les différentes composantes du bien, qu’elles soient matérielles ou immatérielles, et l’état de conservation de ces éléments. La seconde partie définit la stratégie de gestion et de sauvegarde à travers une démarche participative impliquant l’ensemble des  acteurs .La troisième partie détaille le plan d’action, par objectifs Elle définit également les actions spécifiques à mener, le financement nécessaire et le dispositif de suivi et d’évaluation pour ajuster les actions en fonction des résultats.

L’objectif global du plan est d’assurer une gestion durable, transparente et adaptative du bien, en conciliant les exigences de préservation avec les besoins de développement et de valorisation pour les générations futures.

Les Composants essentiels d’un plan de gestion :

  • Inventaire détaillé des ressources patrimoniales : Il s’agit d’un recensement complet de tous les biens culturels d’un site, y compris leur état de conservation et leur valeur historique, esthétique, ou sociale.
  • Objectifs de conservation : Ces objectifs précisent ce qui doit être préservé et comment, en fonction de la nature des biens. Par exemple, des objectifs pour la restauration de monuments historiques ou pour la protection d’une zone archéologique.
  • Mesures de gestion des risques : Cela comprend des stratégies pour minimiser les risques naturels (séismes, inondations) et anthropiques (développement urbain, tourisme de masse).
  • Stratégies de valorisation : Le plan de gestion définit également les stratégies de mise en valeur du patrimoine, telles que l’amélioration de l’accès au public, la mise en place de programmes éducatifs, ou encore la création de musées ou de centres d’interprétation.
  • Partenariats et gouvernance : Un plan de gestion définit les rôles et responsabilités des différentes parties prenantes (gouvernement, autorités locales, communautés, associations) dans la gestion du patrimoine.
  • Suivi et évaluation : Un système de suivi est instauré pour mesurer l’efficacité des actions entreprises et ajuster la gestion du patrimoine en fonction de l’évolution des résultats obtenus.

Cas du bien inscrit : Rabat Capitale Moderne et Ville Historique : Un Patrimoine en partage’’

S’inspirant d’une vision intégrée destinée à assurer la complémentarité entre les actions des différents acteurs, le plan de gestion élaboré en 2011 pour la périoode 2012-2016 couvre les six axes stratégiques ci-après :

  1. La préservation du patrimoine et le respect de la valeur universelle ;
  2. Les outils de la gestion du bien ;
  3. La définition de la fonction des espaces publics et le respect de l’environnement ;
  4. La mise en valeur du patrimoine aux planséconomique, touristique et social ;
  5. La recherche scientifique liée au patrimoine et le partage des connaissances et de la valeur universelle ;
  6. La lutte contre la précarité et l’exclusion sociale notamment dans les quartiers anciens.

Le deuxième plan de gestion 2022-2029 pour Rabat, capitale culturelle et patrimoniale, vise à renforcer la préservation et la valorisation de son patrimoine exceptionnel. Structuré autour de quatre orientations stratégiques, ce plan met en place des actions visant à garantir une gestion durable et participative du patrimoine de la ville.

La première orientation se concentre sur le renforcement de la gouvernance, avec l’objectif de fédérer les acteurs locaux, harmoniser leurs actions et renforcer leurs compétences, tout en actualisant le cadre juridique pour le rendre conforme aux normes internationales.

La deuxième orientation porte sur la préservation du patrimoine bâti, avec des actions visant à conserver les bâtiments historiques tout en améliorant leur usage pour en garantir la pérennité. Cela inclut l’amélioration de l’accès aux espaces publics et aux vues panoramiques.

La troisième orientation est axée sur le développement d’un tourisme durable. Elle implique la création de circuits thématiques, la mise en place d’événements promotionnels et le développement d’infrastructures modernes, tout en respectant les valeurs patrimoniales de la ville.

Enfin, la quatrième orientation met l’accent sur la mise en valeur du patrimoine à travers des projets de médiation, avec la création d’une médiathèque et l’intégration de technologies numériques. Ces actions visent à préserver et à partager le patrimoine de manière durable, en faisant de Rabat un modèle de gestion patrimoniale.

Ce plan, composé de 45 actions, est aligné avec les objectifs de développement durable (ODD) et vise à assurer la mémoire et l’avenir du patrimoine de Rabat.

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